Appel à communication

L’appel à communication s’adresse aux chercheurs des disciplines des sciences humaines et sociales travaillant sur les questions relatives au décrochage scolaire, à partir de méthodologies qualitatives ou quantitatives. Sont également attendus des résultats et évaluations de dispositifs et d’expérimentations. Le colloque souhaite réunir également des acteurs du monde scolaire, des professionnels et des bénévoles du monde associatif, des formateurs, des référents « décrochage scolaire », des doctorants et des représentants d’institutions éducatives et sociales qui proposent des collaborations efficientes en termes d’enseignement, d’apprentissage et de formation.

ARGUMENTAIRE DU COLLOQUE

Dans la plupart des pays du monde, les systèmes éducatifs prennent en compte des difficultés éprouvées par des jeunes dans leurs capacités à apprendre et à suivre une scolarité dans de bonnes conditions. Les difficultés d’apprentissage se traduisent par exemple par des lacunes en matière de calcul, de culture générale ou scientifique, de maîtrise de la langue. Les résultats de l’enquête PISA (2015) montrent qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE, 20% environ des jeunes n’atteignent pas le seuil de compétences en compréhension de l’écrit. Pour un nombre non négligeable des jeunes les difficultés d’apprentissage peuvent entraîner l’abandon de l’école sans diplôme après la période de la scolarité obligatoire (Beauchesne, 1991). Dans tous les cas elles entraînent des difficultés personnelles, économiques et rendent difficile l’insertion sociale et professionnelle. Le décrochage scolaire a également un coût économique important pour la société dans la mesure où il laisse en marge de la société une fraction non négligeable de la population qui ne possède pas ou insuffisamment les compétences de base et se retrouve marginalisée et souvent assistée. Traiter le problème à la source avec l’ensemble des acteurs éducatifs du quotidien apparaît comme une solution efficace.

Par ailleurs, les jeunes qui ne sont pas issus de familles dont le capital, les ressources, les formes de socialisation, les intérêts, les attentes, la langue et le type de pédagogie sont similaires à ceux des enfants scolarisés (classe moyenne indigène), en plus de vivre des difficultés objectives dues au fait de ne pas avoir un "héritage culturel et symbolique" proche de la culture scolaire, se vivent et sont considérés par l'école comme "étrangers", et souvent comme un problème" (Feito, 2003 ; Collet et al., 2014). Par conséquent, l'échec scolaire n'est pas seulement un phénomène individuel de certains élèves qui ne réussissent pas dans une école "neutre", mais l'incapacité d'une institution qui fonctionne à partir des paramètres de la classe moyenne autochtone à intégrer activement et équitablement tous les élèves dans la dynamique de l'apprentissage. De plus, les attentes de départ, des familles et des enseignants sont faibles (Fernández Enguita et al., 2010) et dans la vie quotidienne de l'école, ces faibles attentes trouvent des réalités qui les réaffirment et la prophétie se réalise d'une manière quotidienne et souvent invisible, jusqu'à construire chez le jeune un sentiment de désaffection ou de « désaffiliation scolaire » d’après Broccolichi (1998), d'aliénation, d'incompréhension et d'incapacité par rapport à toute cette école, qui peut devenir irréversible (Ballestín, 2015 ; Garcia et al., 2013 ; Martínez et al., 2013).

Parmi les 12 mesures clés relatives à la réduction de l’abandon scolaire, le rapport européen des ministres de l’éducation (2013) préconise de « soutenir la coopération entre les écoles, les collectivités locales, les parents et les élèves dans le développement de l'école et dans les initiatives visant à réduire le décrochage scolaire. Promouvoir un engagement fort de toutes les parties prenantes dans les efforts visant à réduire le décrochage scolaire au niveau local ». La lutte contre le décrochage, l’échec scolaire ou la délinquance juvénile supposent, pour être efficaces, la collaboration de l’État et des collectivités territoriales et des disciplines scientifiques concernées. En outre, des institutions, des professionnels impliqués (enseignants, acteurs associatifs, travailleurs sociaux, etc.) et des populations cibles elles-mêmes (parents, élèves érigés eux aussi en « partenaires ») sont déterminants.

Par ailleurs, dans la plupart des pays, les acteurs éducatifs sont confrontés à de fortes exigences pour actualiser sans cesse leurs connaissances et leurs compétences suite à l’introduction, par exemple, de nouveaux programmes, de changements dans les caractéristiques et les besoins d’apprentissage des jeunes ou de nouveaux résultats des recherches sur l’enseignement et l’apprentissage. Il s'agit ainsi d’instaurer des approches systématiques et mettre en place des possibilités pour le développement professionnel continu des enseignants, des educateurs et des animateurs socio-éducatifs, tant dans un environnement scolaire que professionnel, avec une attention particulière accordée à la conception d’un enseignement et de pédagogies efficaces, inclusives et innovants, reposant entre autres sur la technologie numérique.

Ce colloque se tiendra à Angers les 6, 7 et 8 juillet 2022 dans les locaux de l’Université Catholique de l’Ouest, en clôture d’un projet financé par Erasmus+ Partenariat Stratégique. Le projet Alliance 3 regroupe des organisations européennes du Danemark (Nyborg School), d’Espagne (Université de Vic), de Hongrie (Eotvos Lorand Université) et de France (Université Catholique de l’Ouest coord.) qui travaillent depuis plusieurs années sur les questions des inégalités à l’école, de l’inclusion et du décrochage scolaire. Il vise à créer des outils, des savoirs et des savoir-faire aux enseignants, aux animateurs socio éducatifs et aux parents pour qu’ils développent leur collaboration afin de participer activement à la lutte contre le décrochage scolaire.

Axe 1 :  Enjeux, inégalités territoriales et action publique : perspectives internationales

Les causes liées au décrochage scolaires sont variées et complexes. Blaya (2010) évoque notamment des facteurs individuel, familial, social ou scolaire. Face à cette multiplicité des causes, il est également indispensable de proposer de multiples interventions dans différents domaines concernés (Gilles, Potvin et Tièche, 2012). Dans plusieurs pays du monde, des politiques éducatives et actions publiques sont proposées pour lutter contre ce phénomène. Celles-ci jouent un rôle important dans le développement, l’éducation et la formation efficace des enseignants et de tous les acteurs éducatifs. L’école est par exemple obligatoire aujourd’hui en France et dans plusieurs pays d’Europe, au moins jusqu’à l’âge de 16 ans. Le système scolaire danois encourage à une culture démocratique scolaire impliquant les élèves et les parents dans la gestion scolaire. Cela permet de créer des valeurs, des règles communes partagées entre les élèves, écoles et familles.

Cet axe s’interrogera sur la définition, les caractéristiques et les effets mesures du décrochage scolaire au niveau international. Il tentera d’analyser les actions publiques mise en place dans différents pays du monde et leurs enjeux. Quels sont les différentes systèmes politiques mises en place dans différents pays ? Ces systèmes ne créent pas des inégalités conduisant au décrochage scolaire ? Quels sont leur enjeux environnementaux, économiques, sociaux ? Quelle est la place du numérique dans ces systèmes et quelle est sa place dans la lutte contre le décrochage ?

Axe 2 : Partenariat pour prévenir le décrochage : école, familles, associations

Dans les problématiques telles que décrochage scolaire l’importance de travailler en concert semble encore plus d’actualité. Gilles Potvin et Tièche Christinat (2012) précisent qu’ «il s’agit  non seulement de collaborer pour mener à bien le projet d’accrochage d’un élève en situation de décrochage, mais de mobiliser des communautés d’acteurs et des réseaux concernés par la situation » (p.6). La multiplication des dispositifs éducatifs « partenariaux » (Barrère, 2013 ; Voléry, 2008) le plus souvent mis en œuvre par les collectivités territoriales, s’accompagne par la reconfiguration des rapports et du travail éducatif entre les différents acteurs. Il s’agit de contribuer à identifier les actions et les pratiques éducatives destinées à prévenir le décrochage scolaire dans une perspective de décloisonnement des mondes scolaires et extrascolaires qui s’appuie sur une dynamique émergente existante sur un territoire et en travaillant sur le lien entre les structures éducatives et sociales qui partagent le même objectif de réussite et d’insertion sociale et professionnelle pour les jeunes.

La mobilisation des collectivités locales et territoriales et des associations sera ainsi interrogée. En quoi le partenariat entre l’école et les structures extrascolaires en dehors de l’école contribue à prévenir le décrochage scolaire ? Qui sont les acteurs mobilisés et à partir de quelles légitimités organisent-ils leurs actions ? Quelles formes de prises en charge favorisent-ils ? Quelle place pour les « alliances éducatives » (Gilles, Potvin et Tièch Christinat, 2012) entre les différents acteurs mobilisés et selon quelles modalités ? De quelle nature sont les dispositifs de co-éducation à l’égard des familles et comment travaillent-ils les formes de coopérations entre professionnels et parents ?

Axe 3 : Les pistes pédagogiques pour agir contre le décrochage scolaire

Cet axe s’intéresse plus particulièrement à l’aspect pédagogique, didactique, formatif et de l’accompagnement dans la prévention et lutte contre le décrochage scolaire. Pour lutter contre le décrochage scolaire, certains systèmes éducatifs et méthodes d’enseignement et d’apprentissages ont été conçus et déployés afin d’aider les élèves en difficulté. Parmi les exemples notables, citons les pratiques des écoles alternatives (Viaud, 2005 ; Cedelle, 2008), les pédagogies soignantes (Ponsard, 2012), les systèmes de transition (Hugo et Pain, 2002), les structures spécifiques pour les décrocheurs (Longhi et Guibert, 2003) ainsi que d’autres pratiques professionnelles et programmes éducatifs innovants mis en place par les enseignants et les éducateurs pour identifier les élèves en difficulté.

Ce n’est pas seulement les méthodes d’enseignement et d’apprentissage proposées à ces élèves, mais aussi l’accompagnement spécifique et approprié à chaque accompagné qu’on met en place en étant devant, à côte ou derrière, dans le sens de Maëla Paul (2004) et qui tient compte de son épanouissement, son histoire, son intérêt, ses projets, sa culture, etc... C’est grâce à l’accompagnement que les différents acteurs déterminent les besoins spécifiques des élèves en difficulté, ce qui contribue d’une manière ou d’une autre à leur inclusion et orientation scolaire et professionnelle. En parlant de l’orientation, selon le Conseil de l’Union européenne (2004, p.2), elle détermine « une série d’activités qui permettent aux (futurs) citoyens de prendre des décisions en matière d’éducation, de formation et d’emploi ». Elle permet également aux élèves de se déterminer et de développer leur autonomie (Guichard, Forner et Danvers, 2000).

Dans cet axe, les communications pourront étudier les pratiques et les dispositifs pédagogiques spécifiques existants répondant aux besoins des groupes d’élèves défavorisés et en difficulté d’apprentissage. En d’autres termes, les propositions peuvent apporter quelques éclaircissements sur les questions suivantes : quelles sont les difficultés des élèves dans les apprentissages conduisant au décrochage scolaire ? Quels sont les approches éducatives, didactiques et organisationnelles susceptibles de prévenir le décrochage scolaire ? Quels les avantages et limites de types d’accompagnement et d’orientation proposés aux élèves en difficulté pour lutter contre le décrochage ? Quelles sont les pratiques professionnelles spécifiques répondant aux besoins des élèves en difficulté ? Quelles sont les compétences à développer chez ces jeunes en situation de décrochage scolaire afin d’augmenter leur motivation dans les apprentissages et leur inclusion scolaire? Enfin, quels sont les dispositifs pédagogiques qui permettraient de passer du décrochage au raccrochage ?

Consignes aux contributeurs :

La sélection des communications par le comité scientifique privilégiera la qualité du matériau empirique, la pertinence du cadre théorique mobilisé, et l’originalité des résultats de recherche. Les communications de doctorant-e-s et jeunes chercheur-e-s sont encouragées. Les propositions de communication sont à déposer pour le 28 février 2022, dans un format de 2000 à 3000 signes espaces compris, bibliographie non incluse. 

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